Parmi les qualités que doit posséder un entrepreneur, celle de savoir prendre les bonnes décisions est certainement la plus importante. Chaque jour, il lui faut trancher entre plusieurs options pour déterminer laquelle sera la plus pertinente pour son projet.
Parmi les questions auxquelles vous devrez nécessairement répondre vient celle du financement. Est-il préférable d’opter pour l’autofinancement (ou bootstrapping), ou la levée de fonds ? Cette question risque d’ailleurs de se poser bien plus vite que vous ne pourriez le penser…
Il s’agit de savoir si votre startup est capable de se développer sans l’aide du financement par “capital-risque”. Mais aussi, de se demander si cette stratégie ne risque pas de freiner votre croissance ! À l’heure où les solutions pour “bootstrapper” une entreprise sont de plus en plus accessibles et efficaces, que le coût du développement technologique est réduit, et que les entreprises qui se battent pour des fonds sont plus nombreuses, l’autofinancement séduit toujours plus d’entrepreneurs…
Mais comme de nombreux aspects de l’entrepreneuriat, la réalité est beaucoup moins binaire. Voyons ensemble les éléments que vous devez avoir en tête pour vous décider !
La levée de fonds, une option pas toujours adaptée à votre projet
Avant de vous lancer à la recherche de venture capital, ou au contraire d’opter pour l’autofinancement, cernez votre besoin. La levée de fonds n’est en effet pas adaptée à tous les projets, ni à tous les profils d’entrepreneurs.
Pour déterminer si elle s’applique à votre startup, ou même s’il s’agit d’une option réaliste, voici les éléments à considérer.
Pourquoi avez-vous besoin de lever des fonds ?
De nombreux fondateurs empruntent automatiquement la voie du financement, estimant que c’est une étape indispensable pour développer leur projet. En réalité, la première question à se poser est celle de l’utilité des fonds que vous espérez obtenir.
Si vous vous contentez de suivre le modèle d’autres startups, ou que vous pensez qu’une levée de fonds rendra votre vie plus facile (en vous permettant d’investir dans de meilleurs bureaux, par exemple), vous faites certainement fausse route. À l’inverse, le bootstrap peut vous obliger à hiérarchiser vos dépenses, et à éliminer celles qui sont inutiles.
Le financement peut cependant être une bonne idée si vous disposez d’une courte fenêtre d’opportunité sur votre marché. Ou encore, si vous attendez de vos investisseurs qu’ils vous fassent profiter de leur expertise et de leur réseau. Ce sera aussi votre seule option viable si vous n’attendez pas un rendement mensuel dans vos premiers mois d’existence.
Avec le bootstrap, vous n’avez aucune assurance de dégager un revenu fixe. Étant donné que la majeure partie de vos réserves de liquidités et de vos flux de trésorerie devront être réinvestis, cette option peut laisser planer un risque au-dessus de votre entreprise pendant longtemps. Et malheureusement tout le monde n’est pas taillé pour gérer émotionnellement ces montages russes…
Quels sont vos objectifs et votre vision à long terme ?
Un bon moyen de trancher entre la levée de fonds et l’autofinancement consiste à déterminer si vos objectifs et votre vision à long terme s’alignent sur ceux de vos futurs investisseurs. Si ce n’est pas le cas, vous risquez au mieux de repartir les mains vides. Ou pire, de vous voir imposer des décisions incompatibles avec les valeurs de votre entreprise, voire des objectifs irréalistes.
Si vous vous alignez sur des investisseurs qui priorisent une croissance financière rapide, vous pourriez vous sentir obligé de donner la priorité à cette dernière. Et ce, au détriment de vos propres priorités humaines et commerciales. Avant toute levée de fonds, assurez-vous donc que vos investisseurs partagent votre vision, et le même engagement envers votre produit. Vérifiez également que vous définissiez les contours de votre succès dans les mêmes termes.
Votre startup est-elle assez attractive pour lever des fonds ?
Selon le magazine Entrepreneur, seulement 0,05 % des startups lèvent du capital-risque. Décider de rechercher un financement et l’obtenir sont, malheureusement, deux démarches très différentes… Et bien que vous ne disposiez que de dix minutes pour dérouler votre pitch, le processus de collecte de fonds nécessite beaucoup de temps et d’énergie.
Pour déterminer le capital d’attractivité de votre startup, vous pouvez vous baser sur des indicateurs comme le marché que vous adressez, votre concurrence, et vos capacités d’exécution. Réfléchissez également à votre stratégie de croissance. Les investisseurs recherchent généralement des projets à croissance rapide et offrant un rendement élevé à court et moyen terme. Avant d’aborder un VC, estimez votre potentiel de développement. Pour vous doter des indicateurs de performance qui attireront le capital-risque, vous devez créer une valeur d’échelle qui surpasse les investissements et les rendements traditionnels.
L’autofinancement signifie-t-il pour autant une croissance lente et des ambitions revues à la baisse ?
De plus en plus d’entreprises rejettent le mythe, jusque-là omniprésent, que la levée de fonds est l’unique voie du succès. La stratégie du bootstrapping (ou amorçage) est pourtant plus adaptée aux entrepreneurs qui souhaitent garder le contrôle sur leur projet, ou encore éviter de diluer leurs fonds propres. Mais elle peut aussi se révéler diablement efficace, et n’implique donc pas automatiquement de renoncer à ses ambitions. Des startups comme Awok ou Mailchimp prouvent ainsi l’inverse.
Les plus cyniques répliquent que l’autofinancement est plus courant, car de moins en moins de startups parviennent à obtenir un financement en capital risque. Mais cette option offre l’avantage de conserver sa marge de manœuvre. Bootstrapper permet en effet de se prémunir contre l’incursion des investisseurs. Une liberté indispensable pour de nombreux entrepreneurs, qui peuvent ainsi fixer seuls leurs propres objectifs et préserver leurs valeurs.
A l’inverse, cette option exige d’avoir les épaules suffisamment solides pour supporter le risque financier que l’amorçage implique. Vous devrez notamment avoir les moyens financiers et psychologiques de renoncer à un salaire dans les premiers mois – ou années ! Attention également à pouvoir vous permettre de vous couper de l’expertise qu’offrent les fonds de venture capital. Vous devrez vous créer un réseau de soutien alternatif, dans lequel vous pourrez trouver de l’entraide et de bonnes idées.
Autofinancement vs levée de fonds : le piège de la binarité
Penser en termes de « Bootstrap versus venture capital” limite en réalité considérablement votre vision du futur de votre entreprise et des ressources disponibles pour encourager sa croissance. Une approche bien plus réaliste, bien que moins accrocheuse, consiste à accepter que vous serez très certainement contraint de commencer par autofinancer votre startup, car la plupart des investisseurs attendront que vous atteignez une certaine traction avant de vous soutenir.
La bonne nouvelle ? Même sans investissement externe, vous avez désormais une myriade d’outils (souvent gratuits) à votre disposition pour vous frayer un chemin vers le sommet. Et au passage, une fenêtre d’opportunités toujours plus large pour développer une entreprise saine et stable, avant d’en ouvrir les portes à de nouveaux stakeholders !