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Nathalie Orvoen et sa vision de l'entrepreneuriat

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Interview de Nathalie Orvoen, Présidente-fondatrice de Les Potageurs.

Interview 2

Edhec Online (EO) : Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de ce qui vous a amenée à l’entrepreneuriat ?

Nathalie Orvoen (NO) : J’ai suivi des études en sciences sociales à la Sorbonne, travaillant notamment sur le sujet de la sociologie de la communication, dans un laboratoire de recherche. Je me suis toujours énormément intéressée à la façon de créer du lien via les écrans et très tôt, les nouvelles technologies et l’innovation ont attiré mon attention.

J’avais toujours voulu devenir journaliste et étant chercheur sur des sujets assez pointus, le journal Le Point m’a un jour sollicitée pour écrire un dossier, ce qui m’a mis le pied à l’étrier. Forte de mon expérience numérique, je suis ensuite partie travailler pour des grands groupes internationaux, comme Usinor (désormais ArcelorMittal). Je m’y suis forgé certaines convictions, notamment le fait que ce qui compte dans la technologie, c’est sa valeur d’usage. Je me suis donc naturellement intéressée à tout ce qui touchait aux énergies et au développement durable, aux différentes manières dont la technologie améliore la relation à l’autre.

Il y a 17 ans, après des postes internationaux, j’ai posé mes valises sur la Côte d’Azur. J’y ai notamment pris le poste de directrice du numérique du Groupe Nice Matin, dont j’ai déployé la stratégie numérique.

Et puis, après 25 ans de montage de projets numériques, j’ai considéré que j’avais assez d’expérience pour me lancer dans l’entrepreneuriat. J’avais envie d’un job plus en phase avec ma vision du monde, qui avait du sens pour moi. 

Lors d’un reportage sur New York, aux Etats-Unis, j’ai découvert le concept d’agriculture urbaine et ai voulu le ramener à Nice. J’ai donc créé Les Potageurs, qui développe l’agriculture urbaine sur la Côte d’Azur et le sud de la France en créant des potagers et des espaces comestibles en milieu urbain. J’occupe aussi le poste bénévole de Vice Présidente de La French Tech Côte d’Azur, où je défends l’entrepreneuriat féminin dans le numérique et la diversité. 

EO :  Vous avez des expériences aussi riches que variées ! Comment définissez votre fil rouge ? 

NO : J’ai toujours voulu progresser et apprendre, je pense que ce qui me caractérise fondamentalement, c’est mon goût pour l’aventure. Pour moi, la vie professionnelle est quelque chose de très épanouissant, dans le cadre de laquelle j’adore découvrir de nouvelles choses. Chaque poste que j’ai pu occuper m’a apporté quelque chose ; une expérience, une rémunération, des avantages, une situation au sein de l’entreprise…

J’ai traversé plusieurs secteurs, mais j’y ai toujours déployé la même compétence : la gestion de projets numériques, avec des équipes à multiples compétences dans des secteurs en transformation, en crise. J’aime être présente au lancement des projets. 

Pourtant, je n’aurais jamais imaginé devenir entrepreneure, cheffe d’entreprise ! J’ai simplement estimé à un moment donné que j’avais acquis une vision suffisamment large et des connaissances suffisamment complètes de l’entreprise pour me lancer.

EO : Quelles sont les choses essentielles à connaître ou à savoir faire pour se lancer dans l’entrepreneuriat ?

NO : Tout dépend des profils, bien sûr, mais je pense qu’il est essentiel pour chacun de respecter ces règles :

  • avoir une idée qui vous tient à coeur
  • être conscient de vos forces et de vos faiblesses
  • savoir bien vous entourer
  • rester réaliste et pragmatique avant tout
  • identifier un contexte financier qui soit favorable. 

Cette dernière partie me semble importante, c’est une erreur que j’ai souvent vue. L’entrepreneuriat, ce n’est pas se dire pas du jour au lendemain “J’arrête tout !” et se lancer. C’est un projet qui se construit et qui demande de la préparation.

EO :  Dans votre transition vers l’entrepreneuriat, y-a-t-il des compétences qui vous ont servies plus que d’autres ?

NO : Mon réalisme ! (rires) Toutes les expériences que j’ai réalisées au long de mon parcours me servent. Autant l’expertise sur les sujets, que les compétences plus comportementales de management et de gestion. 

Je ne vois pas l’entrepreneuriat comme une culmination ou un aboutissement de mon parcours professionnel, mais plutôt une étape logique. Et en ce qui concernes les compétences, il n’y a pas de modèle tout tracé : tout le monde peut se lancer, à partir du moment où l’on reste dans l’humilité et le réalisme

Car dans l’univers des startups, il existe un effet pervers et dangereux : celui de la licorne et des levées de fonds. Dans la course à l’hyper-croissance, il y a finalement très peu d’élus, arriver à ce stade et devenir une ‘licorne’ demande une maîtrise du système et de suivre en France un parcours bien établi. Et parfois, certains s’y cassent les dents.

Mais je pense qu’entre gagner sa vie, faire du chiffre d’affaires et payer des salaires à des gens, en opposition à lever des fonds en grande pompe sans avoir trouvé de modèle économique viable, il faut faire la part des choses et éviter le ‘star system’. Il y a deux types d’entrepreneuriat. Pour ma part, je pense que c’est un bel accomplissement que chacun soit en capacité de créer son propre emploi et de créer sa propre source de revenus. 

EO : Avez-vous des conseils à partager aux entrepreneurs qui souhaitent se lancer ?

NO : Je pense qu’il faut apprendre à regarder autour de soi et identifier les opportunités. Pour ma part, j’étais en poste chez Nice Matin, il y avait des mouvements d’actionnariat au sein de la boite, et je savais que les changements ne correspondaient pas à ma vision des choses. J’avais le sentiment d’avoir fait le tour de ce que je pouvais faire, et avais ce projet entrepreneurial en tête : ça a été le moment idéal pour me lancer.

Bien sûr, il y avait des craintes tout au long du projet, mais je pense que dans l’entrepreneuriat, il y a une notion de timing qu’il ne faut pas négliger. Ça faisait aussi 18 mois que je travaillais chez moi sur le projet sur mon temps personnel. Structure de la société, vision, début de business model…. En me lançant officiellement, j’avais déjà le projet en tête et certains éléments prêts, je ne suis pas partie en claquant la porte du jour au lendemain.

Je pense que la formation est aussi un élément important. Je suis pour ma part allée faire un stage chez les pionniers de l’agriculture urbaine en France, qui m’a permis de comprendre ce que c’était concrètement de changer de travail, et d’avoir les mains dans le cambouis ! 

Par ailleurs, assurer sa stratégie financière, y compris son retour sur l’éventuel marché du travail, en capitalisant sur ce que l’on a déjà créé avant, est un excellent réflexe à avoir en cas de changement de projet professionnel ! Mais quoi qu’il en soit, et quel que soit son profil, l’entrepreneuriat est une belle aventure, riche en apprentissages.