Les heures supplémentaires et le surinvestissement de soi au travail n’ont plus le vent en poupe. Omniprésent dans les médias depuis quelques temps, la tendance de la démission silencieuse, ou quiet quitting, désigne ces collaborateurs qui refusent d’en faire plus que le strict minimum au bureau.
La démission silencieuse annonce-t-elle une crise du travail, ou la redéfinition du sens que l’on donne à sa carrière ? Sûrement un peu des deux… Dans cet article, on vous propose de décrypter cette nouvelle tendance qui fait rage dans l’univers du travail !
La démission silencieuse au travail, c’est quoi ?
La démission silencieuse au travail est une notion qui nous vient des Etats-Unis, où elle est appellée le quiet quitting. En septembre 2022, un sondage Gallup révèle que 50 % des collaborateurs à temps plein ou temps partiel de plus de 18 ans seraient des «démissionnaires silencieux». Autrement dit, des personnes qui refusent de se surpasser au travail et qui se “contentent” de remplir les missions listées dans leur fiche de poste.
Rapidement, le concept de démission silencieuse au travail s’impose dans le débat public américain, puis international, et notamment français. Même s’il est pour l’instant relativement nouveau (et manque d’une méthodologie fiable qui permettrait d’en comprendre les contours), le buzzword prend. Le contexte de mutation du travail, ainsi que la vague de démissions suite à la pandémie n’y sont certainement pas pour rien…
Un désinvestissement massif des travailleurs
L’intérêt médiatique pour le sujet de la démission silencieuse des travailleurs dénote surtout l’inquiétude que ce désinvestissement provoque chez leurs employeurs. Il semble aussi révéler une perte de “contrôle” sur le quotidien des c, qui télétravaillent de plus en plus.
Dans les faits, les craintes des dirigeants ne sont pas complètement infondées. Un sondage IFOP a montré que 37 % des actifs français se sentent bel et bien proches de la démission silencieuse. Ce seraient don près d’un tiers des actifs qui auraient décidé de travailler sans zèle, refusant les heures supplémentaires ou les tâches qui ne relèveraient pas de leur fiche de poste.
L’élément le plus révélateur est peut-être que cette tendance est en nette augmentation. En 1993, les collaborateurs étaient seulement un tiers à déclarer que la rémunération était leur principale motivation. Aujourd’hui, à l’aune de la démission silencieuse, il semblerait que cet élément de motivation prenne de l’ampleur. Alors, pourquoi un tel revirement ? Pour les observateurs, ce désinvestissement massif serait la cause d’un constat désagréable. Celui que donner son maximum à l’entreprise ne paye pas. En 30 ans, le nombre de français qui ont la sensation de donner plus qu’ils ne retirent de leur travail a presque doublé.
Une tendance qui n’est pas réellement ancrée
D’un autre côté, on peut se demander si l’inquiétude des employeurs face aux quiet quitters n’est pas disproportionnée. En réalité, cette peur est aussi ancrée dans des clichés sur les travailleurs, qui ont encore la vie dure, notamment sur leur potentielle fainéantise.
En effet, ce refus de faire preuve de zèle au travail n’est pas aussi nouveau qu’on pourrait le croire. Il existe de vieilles notions comme le freinage qui, dans le monde ouvrier, consistait à limiter volontairement la production. Ou encore le concept de retrait, que l’on doit au sociologue Renaud Sainsaulieu. Là encore, la motivation du collaborateur est mise en perspective avec le manque de reconnaissance dont il bénéficie au travail ainsi que sa volonté de privilégier la sphère personnelle.
Les signes de la démission silencieuse au travail
Même si elle n’est pas forcément aussi inquiétante que certains l’affirment, la démission silencieuse au travail est bien une réalité. Alors comment l’appréhender, et quels en sont les principaux symptômes ?
Pour savoir si vous êtes un quiet quitter (ou si vous travaillez avec un démissionnaire silencieux), soyez attentif aux signes suivants:
- Le refus de faire des heures supplémentaires. Rien ne vous y oblige légalement, mais vous vous limitez strictement à vos heures de travail ;
- Ne jamais ouvrir un mail professionnel en dehors du travail. Pas la peine de vous écrire après 18 heures, vous refusez d’ouvrir votre messagerie une fois le bureau quitté ;
- Le manque d’initiative. Certains employés se damneraient pour avoir de nouvelles missions. Pas vous ! Vous en restez à votre fiche de poste et ne prenez aucune initiative.
- Le refus de se définir par son travail. La première chose que vous dites de vous à une nouvelle connaissance, ce n’est pas ce qu’est votre métier mais plutôt vos passions, votre statut familial… Autrement dit, tout sauf votre travail;
- Ne jamais participer aux évènements de team building. Il ne faut pas compter sur vous pour être présent aux afterworks, repas de Noël ou week-ends entre collègues.
Vers une nouvelle définition du sens au travail ?
Si la démission silencieuse n’est clairement pas une bonne nouvelle pour les employeurs, ni un indicateur de bien-être professionnel, elle est tout de même une opportunité de changer le sens que l’on donne au travail. Après tout, les collaborateurs d’une entreprise sont des agents rationnels, qui ajustent leur engagement au travail en fonction des avantages (matériels et immatériels) qu’ils en retirent.
Plutôt que de diaboliser les travailleurs qui manqueraient de zèle, mieux vaut chercher des solutions pour créer l’envie de s’investir. Mais aussi, revoir ses attentes en tant qu’employeur et s’assurer qu’elles soient réalistes…