Il est passé de chirurgien à entrepreneur dans la MedTech (les entreprises Tech dans le secteur de la médecine).
En parallèle de sa formation au sein de l’Executive Master Programme Manager Online de l’EDHEC, Éric Séjor mène d’ores et déjà la vie professionnelle qu’il se figurait comme idéal de carrière depuis ses études de médecine. Un changement qui aura été accéléré notamment par son introspection au sein de la formation. Rencontre.
Éric, vous êtes chirurgien de métier… Comment avez-vous choisi de vous reconvertir professionnellement ?
Je suis en effet chirurgien digestif de métier. J’ai passé plus de 20 ans à ce poste à l’hôpital. En tant qu’agent public, j’avais une position relativement confortable. J’aurais pu continuer ainsi encore longtemps si je n’avais pas éprouvé le besoin de me renouveler.
Et alors, qu’est-ce qui vous a décidé ?
On peut dire que je suis en reconversion professionnelle. Je passe d’un métier purement médical à un rôle de conseil scientifique dans une start-up, qui recouvre aussi d’autres facettes.
Pour tout vous dire, ce changement de trajectoire vient de loin. Déjà lorsque j’étais étudiant en médecine, j’ai le souvenir d’avoir dit à mon père, médecin, que je ne ferais pas cela toute ma vie. Il m’avait répondu alors : « finis déjà tes études de médecine, et une fois diplômé, tu feras ce que tu voudras ». J’ai donc terminé ces longues études et choisi la chirurgie pour spécialité.
Ces quatre dernières années, je me suis investi dans la recherche et j’ai collaboré avec des laboratoires de Sophia Antipolis. J’ai ainsi déposé plusieurs demandes de brevets pour du matériel chirurgical. Parallèlement à cela, j’avais contacté Muriel Cauvin de l’EDHEC, pour lui faire part de mon projet de changement de voie. La reconversion me trottait toujours dans la tête : c’est pourquoi je me suis inscrit à la Formation Manager de l’EDHEC.
C’est finalement une opportunité professionnelle qui m’a décidé. J’ai en effet été contacté par l’industrie du matériel médical, ce printemps. Truffle Capital, un fonds d’investissement spécialisé dans les BioMedTechs et les FinTechs me proposait de les rejoindre. J’ai saisi la main qu’on me tendait pour me lancer dans l’entrepreneuriat tout en sachant que j’allais bénéficier de l’enseignement théorique offert par l’EDHEC.
Et donc, racontez-nous ce que fait la start-up à laquelle vous apportez votre expertise médicale.
Je travaille désormais pour Truffle Capital ainsi que pour deux start-ups créées par le fonds. Mais mon activité se concentre principalement sur la création d’une start-up dédiée à la robotique chirurgicale.
Les robots chirurgicaux ont offert un plus grand confort, une meilleure vision et une plus grande précision aux chirurgiens. Malheureusement, ces robots sont dénués d’intelligence car ils sont téléopérés. Leurs bras sont en effet asservis car ils répondent aux commandes du chirurgien qui est assis devant une console.
L’ambition de la start-up que nous avons créée est d’automatiser certains temps opératoires en introduisant de l’Intelligence Artificielle au cœur des robots chirurgicaux.
Donc, demain, nous serons tous opérés par des robots ?!
Oui, mais ce n’est pas pour tout de suite. L’Intelligence Artificielle prendra d’abord des décisions dans des situations connues. Ces robots seront très spécialisés sur une ou plusieurs opération(s) et pourront donc évaluer et choisir la solution la plus adaptée dans chaque cas.
Au début, ce sera probablement un outil d’assistance. Le chirurgien supervisera la machine à l’instar de ce qui se fait dans un cockpit d’avion. La décision de lancer la procédure reviendra toujours aux chirurgiens.
Il faudra du temps pour que le robot soit capable de décider lui-même de l’attitude à adopter. Je pense que les robots seront autonomes sur des temps chirurgicaux dans 5 à 10 ans. On y travaille !
Et on sait déjà sur quelles opérations ce robot fonctionnera ?
Pas encore. Pour l’instant, nous sommes en pleine phase de recueil du besoin auprès de nombreux chirurgiens. Nous menons des entretiens auprès de ces spécialistes pour savoir quel serait le robot idéal.
Une fois cette phase terminée, nous passerons au prototype. Puis, nous testerons cette machine avec les chirurgiens que nous aurons interviewés pour la faire évoluer. Quant aux temps opératoires concernés, je ne peux cependant pas vous en dire plus pour l’instant.
Est-ce que cela ne pose pas un problème éthique, de déléguer la vie humaine à une machine ?
Non, car c’est déjà le cas dans le transport aérien. Un avion de ligne pourrait décoller, voler et atterrir sans intervention humaine. Or, c’est aujourd’hui le moyen de transport le plus sûr. On peut donc imaginer que cela soit possible pour la chirurgie et ce d’autant plus si l’on démontre que les procédures réalisées par la machine diminuent la morbi-mortalité des patients.
On sait qu’un robot fait gagner en précision et en confort. Par le passé, certaines opérations étaient longues et éprouvantes. Avec les robots téléopérés, ce confort d’opération a réduit le temps au bloc et certaines erreurs.
Le but avec l’Intelligence Artificielle robotisée est d’aller encore plus loin dans l’exercice — peut-être même que le chirurgien sera dans une salle de contrôle et opérera plusieurs personnes en même temps.
Si on arrive à prouver que le robot occasionne beaucoup moins de complications que l’Homme, pourquoi ne pas l’utiliser ?